Les cartes postales

Notes de l'auteur

Veuillez prendre note que ce texte est fictif, même s'il existe bel et bien une vielle nommée Chartierville au Québec, il ne s'agit pas de celle-ci, mais plutôt d'un décor tiré de mon imaginaire. J'avais une image à passer et j'ai simplement choisi ce nom, qui aurait aussi bien pu être Granby. Mes intentions ne sont surtout pas de dénigrer les réels habitants de cette ville et toute ressemblance ne serait que pure coincïdence. Merci de garder cette note bien à l'esprit en lisant cette nouvelle.

Les cartes postales

C’était la première fois que je mettais les pieds dans ce bled de pèquenots. Le genre de petit village à des kilomètres et des kilomètres des grands centres. Vous savez, quand vous regardez autour du village et que tout ce que vous pouvez voir à perte de vue, c’est des champs. Tellement isolé que l’on se demande où les gens travaillent et si leurs enfants vont à l’école. Ouais, Chartierville, c’est bien ce genre de trou.

J’avais vraiment pas le choix de m’arrêter dans un petit boui-boui du coin, je crevais tellement la dalle que j’étais entrain de me bouffer de l’intérieur. La seule crainte que j’avais, ce n’était pas de faire un empoissonnement alimentaire, mais plutôt de tomber sur une bande de consanguins qui pouvaient avoir la fâcheuse manie de dévorer les touristes. Enfin, je garai la voiture devant le restaurant, dont l’affiche était tellement vieille qu’on pouvait y distinguer le jaunissement dû vraisemblablement par le temps, mais dont il était impossible d’y déchiffrer le moindre mot. Je sortis du véhicule et pris une respiration profonde de l’air ambiant. Ça sentait la merde de poulet et le foutu redneck dans tout le coin.

Je pris mon courage à deux mains et entrai dans le bâtiment. Il y avait une forte odeur de graisse qui avait dû brûler plus longtemps que sa durée de vie. Quelques clients assis au comptoir me dévisagèrent, puis retournèrent à leurs fayots. Pour ma part, je pris place à une table dans la salle presque vide sauf pour un autre gars à une table près de moi, tourné vers la vitrine regardant l’extérieur.

La serveuse vint prendre ma commande (un menu très varié comprenant de la soupe ou des fayots) puis mon attention s’arrêta sur ma table. Celle-ci était couverte de cartes postales montrant différentes parties du Québec et Chartierville elle-même (allez savoir comment). La carte de la ville se trouvait au centre de la table entourée de toutes les autres cartes collées sous une plaque de verre.

Ma soupe arriva et j’eus seulement le temps d’en prendre une cuillérée avant d’être pris d’un atroce mal de ventre. Où étaient les toilettes? Je me mis à courir vers la porte sur laquelle on pouvait voir l’image d’un patriote avec son arme. Pas de chance pour moi, la toilette devait être aussi crasseuse que le cul d’un ermite pris dans le fin fond des bois. Néanmoins, je me suis mis à la besogne, pour que mes sous-vêtements ne ressemblent pas à la toilette elle-même. Je ne me souvenais pas de mon déjeuner, mais je peux vous assurer que ce qui est sortit de moi, je suis certain que je l’avais pas mangé..enfin, je vais m’abstenir des détails.

Je revins à ma table. Au moment de m’asseoir, je constatai que les hommes au comptoir me dévisageaient de façon très antipathique. Je m’assied et commençai à manger plus rapidement. L’homme qui était assis près de moi s’était levé pendant que j’étais aux toilettes pour prendre le journal, revint, restait debout près de moi me regardant d’un air offusqué pendant un moment. Je fis semblant de l’ignorer. Il finit par s’asseoir à la table à ma gauche pour manger sa soupe. J’ai trouvé ça un peu étrange, parce que quand je suis arrivé ici, il était assis à ma droite. Bof, je renonçai à essayer de comprendre. Sérieusement les gens du coin et leur attitude à la con commençaient vraiment à me faire chier. Les étrangers sont reçus comme des terroristes ici!

Je me remis à manger ma soupe quand mon attention fut attirée de nouveau par la carte postale de Chartierville. Celle-ci avait changée de place et se trouvait maintenant dans le haut à l’extrême droite de la table. Bordel! Ils avaient même changé la table pendant mon absence. S’en était assez, j’allais aller me bouffer de l’intérieur ailleurs! Je me leva pour payer l’addition. La serveuse me regarda avec des yeux enragés.

«Merde, c’est toujours comme ça que vous recevez vos touristes ici? Pas étonnant que Chartierville ne sois pas sur la carte! » m’écriai-je. Ce à quoi elle répondit « Comment voulez-vous que l’on agisse quand un étranger mange dans l’assiette d’un autre client! »

Je regardais la table où mon voisin mangeait encore, pour constater que la carte postale de Chartierville se trouvait en plein centre de celle-ci. Le type était entrain de finir la soupe que j’avais commencé, puisque j’avais bien mangé la sienne. Je rougis de honte et sortis rapidement. Plus jamais je ne reviendrai à Chartierville.

Comments

[vlan]

Je vous avais vraiment pris pour un touriste insatisfait et dénigrant. Mes excuses.
Bonne chance.